Les Américains à Carlsbourg


En 1944, j’avais 19 ans. Ma famille habitait Carlsbourg, en face de l’Institut des Frères. Depuis le mois de mai 1944, cette école servait de lazaret à l’Armée allemande. Plus de 900 blessés y ont séjourné.
Le 30 août, ces blessés sont évacués vers Reims et Namur. C’est le moment où les troupes allemandes refluent sur les routes.
Le 1erseptembre, une colonne de la Wehrmacht traverse le village en direction de Dinant. Six avions anglais la repèrent, piquent sur elle et la mitraillent: trois maisons brûlent à l’entrée du village. Ce jour-là, les infirmières, les docteurs et tout le personnel du lazaret partent. Il ne reste plus aucun Allemand dans Carlsbourg. On attend les Américains avec impatience.
Le 6 septembre, le frère Victor frappa à notre porte, il avait les bras chargés de fleurs. Le jardinier qui l’accompagnait portait une boîte remplie de bouquets. Le frère me dit: «Viens vite, les Américains sont là, on va les fleurir». Je ressentis une joie si forte que je restai sans parole.Une Jeep passa, le drapeau étoilé déployé, mais elle ne s’arrêta pas. Tout de suite, un camion arriva. J’avais retrouvé ma voix et je l’acclamais. Le camion s’arrêta, 2 soldats américains sautèrent du camion et je m’avançai vers eux et leur offris les fleurs. Ils m’embrassèrent; un des deux me prit dans ses bras et me posa dans le camion. Je continuai à distribuer les fleurs.
C’était une scène surréaliste. Ces soldats américains avaient le visage fatigué, poussiéreux. Ils n’avaient pas le look des vainqueurs. Ils m’embrassaient, me souriaient gentiment, mais à qui pensaient-ils? A la sœur, à la fiancée, à l’épouse, aux enfants restés là-bas dans leur pays?
Chaque soldat m’offrit du chocolat, des cigarettes, des boîtes de fromage fondu, du pâté de viande, du beurre de cacahuète et des chewing-gum. Je n’avais pas assez de mes mains pour garder tous ces cadeaux. Un soldat sortit de sa poche un grand carré de soie blanche qui servait à fabriquer les parachutes et il emballa tout dedans.
Un dernier «au revoir». Le camion partit emportant avec lui toute ma joie. La guerre n’était pas terminée et qui savait si ces jeunes gens venus de si loin retrouveraient un jour leur pays, leur famille? Leur vie s’est peut-être achevée chez nous, dans les derniers combats contre l’ennemi encore présent dans les villages voisins ou dans la forêt enneigée lors de la bataille des Ardennes. Il n’y aura jamais de réponse.
Marie Graas-Denis



Septembre 1944 –Offagne


En 44, j’avais huit ans... je relaterai ci-dessous une anecdote dont je me souviens clairement mais que je voudrais replacer dans un cadre un peu plus large. Pour ce faire, j’ai consulté trois personnes qui ont pu m’y aider: l’une née en 1930, l’autre en 1931, la 3een 1932.Le 7 septembre 1944 dans l’après-midi
Combats sévères à la sortie de Paliseul, route d’Offagne, près du «Sacré-Cœur». Cinq tanks allemands se font pulvériser par les lance-flammes américains. Deux parviennent à s’échapper en direction de Sart-Jéhonville, prenant position sur la route d’Anloy. Après quelques heures de combat, deux auto-chenilles de la Croix-Rouge allemande déchargent à l’entrée d’Assenois, dans la maison Ansay, située juste à l’entrée venant de Jéhonville, une quarantaine de blessés dont certains hurlent de douleur: on va scier sans anesthésie... Pas de plâtre! Monsieur A.P., 22 ans, est requis pour scier des planches qui serviront d’attelles. A la requête des médecins, il sciera des planches à la demande et selon la mesure exigée, jusqu’à 4 h du matin, ce, pendant que des dizaines de chevaux piétinent à Blanche-Oreille(!) puis lèvent le camp en direction de Libramont.
Le 8 septembre 1944
Après quelques tirs allemands provenant de Biscayeen direction des Américains avançant de Paliseul à Périjé–tirs trop courts car les objets retrouvés au Pré Sainte-Catherineen attestent –les soldats allemands refluent vers Offagne. Certains arrivent à se poster derrière la Grotte Notre-Dame de Lourdesoù ilsont creusé une tranchée pour surveiller le repli de leurs camarades à la bifurcation de Sart-Jéhonville.
Trois d’entre eux descendront dans Offagne vers 15 h30: un mitrailleur chargé de son arme et deux servants portant les projectiles. Quant à moi, qui sors probablement de l’école à 11 h, j’aperçois au pied de la croix (qui n’est plus là, à l’angle de l’actuelle maison Nemery-Philippe) le premier Noir de ma vie et aussi le 1erfantassin américain, fusil prêt à faire feu, épiant de droite et de gauche,refoulant énergiquement Suzanne L. qui veut se lancer à son cou pour l’embrasser!...
Après s’être surveillés les uns et les autres toute la journée, Américains et Allemands se talonnent: ces derniers repliés dans notre cuisine ont pointé leurs jumelles en direction de la borne 62 actuelle, château d’eau sur la crête, route de Jéhonville et se sont aperçus que les Américains y étaient et allaient descendre vers le village –d’où le poste de mitrailleurs à la Grotte Notre-Dame de Lourdespour protéger le retrait, terminé vers 15 h30. Les Allemands quittent Offagne par la route d’Assenois...
Nous sommes libérés...Deux soldats allemands recrus de fatigue dorment... et se rendent: l’un dans la maison Thiry, l’autre chez Pigeon. Ils sont faits prisonniers. Quel âge ont-ils? Sont-ils des gamins comme celui qui, hier à Assenois, pleurait appuyé sur une cloison d’écurie et qui, au passage d’un gradé, se plante au garde-à-vous les yeux rougis?
Bernard Dury


Dans un village de la zone entre Paliseul et Bouillon

J'avais à peine trois ans et n'étais probablement pas plus haut que trois pommes. La guerre, pour moi ne signifiait pas grand-chose, à part que ma petite tête avait sans doute déjà enregistré quelques affreux récits: mon oncle tué le 10 mai40 dans un âpre combat contre l'envahisseur, maman gravement blessée de trois balles par un avion ennemi alors que comme bien d'autres personnes du village, elle s'enfuyait sur les routes de France...et sans doute encore d'autres terribles épisodes que l'on devait souvent conter autour de moi.
Lorsqu'en septembre 44, les troupes allemandes refluaient de France vers l'Allemagne, de nombreux convois devaient sûrement emprunter la Nationale venant de Sedan par Bouillon vers Libramont ou autres destinations. Un certain soir, une colonne en déroute a envahi notre petit village et sans doute réquisitionné pas mal de choses. Mes parents tenaient à cette époque une petite ferme comme la plupart des habitants: un cheval, quelques vaches, veaux, cochons, lapins, couvée....Un blindé allemand (pour moi, il était énorme) s'est alors arrêté devant la grange et papa a été contraint d'en ouvrir les grands battants pour laisser entrer le véhicule recouvert d'un filet de camouflage et de quelques branchages....(là, mon esprit n'est pas très sûr des détails). Je suppose que les soldats voulaient être à l'abri de tous regards et passer une nuit plus ou moins tranquille dans le fenil bien garni. La nuit s'est passée sans incident et le lendemain matin, la troupe s'est remise en route très tôt pour fuir les Alliés qui approchaient et leur collaient aux bottes.
Mon père est alors monté sur le fenil pour y chercher du foin destiné à nourrir les bêtes qui se trouvaient à l'étable. Je me souviens qu' en ce temps-là, on utilisait un "havet" ou un grand crochet pour tirer le foin qui avait été rentré en vrac et soigneusement tassé à la fenaison. Papa a-t-il ou non planté son outil une, deux ou plusieurs fois, je ne le sais...mais à ce moment-là, un soldat Allemand est sorti du tas de foin où il s'était soigneusement caché en criant et en levant les bras pour se rendre....Je vous laisse à deviner la surprise et la frayeur de mon père qui a alors obligé le soldat à descendre sous la menace de sa fourchequi devait pas mal trembler à mon avis. Ayant entendu du bruit, le petit bout que j'étais alors s'est empressé d'aller voir ce qui se passait...A ma grande surprise, je vis arriver dans l'étable qui jouxtait la grange un grand gaillard avec les mains sur la tête suivi de mon père qui le tenait en respect au bout de sa terrible fourche. Etrangement, ce militaire a alors fouillé ses poches et m'a tendu un rouleau de bonbons, (à ce qu'il me semble encore aujourd'hui, cela devait être des espèces de grosses pastilles blanches comme des bonbons à la menthe). Papa a emmené l'homme à la cuisine où ils ont plus ou moins essayé de se comprendre. L'Allemand baragouinait quelque peu le français...il voulait se rendre, avait horreur de la guerre et n'acceptait absolument plus de se battre
Mes parents lui ont sans doute offert un petit quelque chose pour se restaurer frugalement et l'homme, en confiance, s'est mis à pleurer....il n'était plus tout jeune, pour moi, petit gosse, il avait même l'air vieux, et il a montré les photos de sa femme et de ses enfants qu'il désespérait de revoir un jour vivants.
C'est là que la guerre affreuse se terminait pour lui, il s'était caché dans le foin pour ne plus combattre et dans la pagaille et la panique de la déroute et l'empressement compréhensible du départ très matinal, ses compatriotes ne s'étaient peut-être même pas aperçus de son absence.
Quelque temps plus tard, des hommes de l'AS (à ce que je crois) ou d'autres personnes du village, ont emmené le prisonnier vers le carrefour de Menuchenet pour le remettre aux forces américaines qui talonnaient vraiment les Allemands et qui occupaient déjà ce carrefour stratégique.
Je n'ai plus jamais entendu parler de ce soldat et ne sais absolument pas ce qu'il est devenu......
GB



Libération de Plainevaux en septembre 1944


Tout a commencé la nuit du 6 au 7 septembre 1944. Les jours précédents tout était calme dans le village depuis les mitraillages du 1erseptembre à Almache (convoi allemand), à Carlsbourg (convoi allemand) et le départ des Allemands de la Croix Blanche où ils avaient installé une station radar.
Je fus réveillé en sursaut cette nuit-là (du 6 au 7 septembre) vers 3 –4 heures du matin. J'entendais le bruit d'un convoi. Effectivement, par la fenêtre ouverte de ma chambre à coucher à la maison de mes parents, j'aperçois les lueurs occultées de nombreux véhicules débouchant de Menuchenet. Je crie à mes parents: "Je crois que les Américains arrivent de Menuchenet", et je m'habille et descend rapidement en bas.
Au moment où je veux ouvrir la porte d'entrée, stupeur! un coup de crosse de fusil frappe la porte et en même temps un cri: "offen" ! Pas de doute, cesont des Allemands. Et j'ouvre la porte –autre moment de stupeur –un soldat en uniforme kaki (c'était un membre de l'organisation Todt) me braque son revolver sur la poitrine en criant: "Terrorist...". Je réponds:"Nein terroriste". Entretemps, ma mère s'était levée; mais déjà le soldat, suivi d'autres, s'était approché du buffet de la cuisine, une bouteille de vin en main. Il sort des verres du buffet et dit à ma mère: "Vin...Mama...". Les verres sont-ils posés sur la table qu'un soldat gris (qui m'a semblé être un "feldwebel") pénètre aussi chez nous. Il est suivi d'autres soldats. D'un vigoureux coup de poing sur notre table il chasse les membres de l'organisation Todt. Il exige d'ouvrir les portes de grange et fait entrer un petit camion dont les occupants sont vraisemblablement des troupes de transmission (présence de différents éléments de téléphone de campagne).
Le feldwebel passera la nuit dans le fenil, dans un trou pratiqué depuis quelques jours pour extraire le foin nécessaire aux chevaux. Les 2 ou 3 autres soldats trouveront place dans l'étable sur des bottes de foin.
A l'extérieur, j'aperçois Eugène Robert qui m'appelle et m'invite à l'entrée de la cuisine où couchés à même le pavé 3 ou 4 soldats allemands dorment exténués.
Sur la grand-route qui va vers Menuchenet (route existant avant la création de l'autoroute actuelle) un convoi de blindés tigre ou panthèremonte vers le carrefour tandis que d'autres blindés se dirigent dans l'autre sens.
Les dernières heures de cette nuit se passèrent dans le calme. Le lendemain matin, mon père s'approcha du soldat téléphoniste qui dans sa camionnette à la grange réparait un appareil. Ce soldat parlait assez bien le français et avait fait comprendre à mon père qu'il en avait assez de la guerre. Peude temps après, le feldwebel et les deux soldats vinrent déjeuner dans la cuisine. C'est alors que mon père s'adressa au vieux: "Où allez-vous aujourd'hui?", mais le feldwebel coupa sèchement: "Monsieur, nous ne partons pas aujourd'hui".
Au dehors, quelques véhicules militaires se déplaçaient: peu de trafic cependant sur la grand-route. Mais on se rendait bien compte que si la fin de la retraite était proche, il y avait encore des troupes allemandes au-delà de Menuchenet.
Le temps était gris, il se mit à pleuvoir; puis la pluie devint battante, c'était presque une tempête. La fin de la matinée approchait. Nous avons dîné comme d'habitude; les soldats allemands allaient à leur tour prendre leur repas quand soudain quelques violentes détonations retentirent. Le feldwebel s'écria: "Panzer"! et tous, immédiatement, quittèrent la table et que la plupart des soldats cantonnés dans notre quartier partirent...
Je quittai notre maison par l'arrière et c'est ainsi que je me rendis compte que quelques panzers tapis dans les fossés de la grand-route attendaient prêts à intervenir. Je rentrai précipitamment et de nombreux voisins inquiets à la suite des détonations vinrent se réfugier dans la cave bétonnée de la nouvelle maison construite en 1938 (actuellement lamaison de Pierre Nicolas). Il y avait notamment avec ma famille, Angelo Fadani et sa dame, Léona, femme de Ferdinand Pierlot et ses enfants, Hector Dupuis et sa femme.
Je faisais la navette entre la cave et le grenier de la maison où par l'une des fenêtres je pouvais apercevoir clairement ce qui se passait Devant le bois, lieu-dit situé à l'entrée du carrefour de Menuchenet et de la forêt.
La pluie avait pratiquement cessé. Soudain j'aperçus là-bas à l'entrée du bois, une animation intense. Deux ou trois petits canons étaient en position du côté droit. Les soldats qui les servaient s'étaient camouflés à l'aide de gerbes d'avoines qu'ils avaient empruntées aux moyettes plantées dans le champ contigu.
Les canons entrèrent en action mais le feu ne durapas longtemps; on voyait néanmoins les flammes s'échapper de la gueule des canons et on entendait, bien sûr, le bruit des détonations ce qui ne rassurait pas les familles installées dans la cave. J'allais régulièrement rendre des nouvelles de ce qui se passait à l'entrée du bois.
Et bientôt ce fut la retraite. Des véhicules militaires repassèrent sur la grand-route. Puis repassèrent à pied, un groupe de soldats nettement fatigués, probablement une vingtaine; ils s'arrêtèrent au carrefour de Plainevaux(je les observais secrètement de ma fenêtre; certains traînaient leur fusil derrière eux.
Soudain, très probablement un sous-officier déjà âgé et de grande taille, porteur d'un caban au lieu d'une capote, de ses deux bras rejeta vers l'arrière son caban et avec une réelle audace, observa à la jumelle, ce qui se passait à Menuchenet..
Effectivement, entre les grands arbres (dont la forêt a été amputée pour la construction de la voie rapide), à l'orée du bois, je vis de mon observatoire des soldats qui s'échelonnaient et circulaient à cet endroit. Puis je fus attiré par un autre événement: de la fenêtre du grenier, j'aperçois soudain, sans me rendre compte de quel côté elle était venue, une chenillette allemande montée par deux hommes. Rapidement elle pirouette sur place devant la grange de Gabriel Nollevaux et va pénétrer dans cette porte de grange fermée à reculons. Le propriétaire arrivera à temps pour ouvrir; l'un des soldats sort l'air énervé, scrutant tout autour de lui, puis il s'empare de la brosse à laver de M. Sellette et s'empresse de faire disparaître les traces des chenilles sur le sol devant la grange.
Mais le conducteur a déjà entrepris de remettre le moteur en route et les deux soldats sur leur chenillette quittent ce lieu et rapidement se dirigent vers notre grange: j’arriverai trop tard pour ouvrir, mais ô surprise, la barre transversale a cédé et la porte de la grange s’est ouverte. La chenillette ne resta dans la grange qu’un petit instant, puis traversa la chaussée et vint s’encastrer entre le calvaire et la maison d’Eugène Robert. Un des soldats portait le traditionnel ruban de cartouches.
Le père Robert, à l’intérieur de la cuisine, observait secrètement mes deux gaillards. Puis la chenillette s’avança à nouveau vers le chemin; c’est à ce moment que environ 200 mètres plus bas, Arthur Denis, qui était dur d’oreille sortit de sa maison. Un des soldats lui criait mais en vain «kwatir Monsieur» (ce qui signifiait dans le langage du soldat allemand: se mettre à l’abri; en patois, nous dirions «s’acwati», peut-être en avait-il retenu une bribe?). La chenillette remonta vers la grand-route, mais semble-t-il pour gagner du temps, coupe court et traverse le verger «Bertrand» en défonçant la haie. La brèche sera visible longtemps. Eh bien, ce furent les derniers soldats allemands qui quittèrent le village.
Les Américains en vue!
Prudemment les gens sortent des maisons. On regarde, on se rassemble, on parle, on se rassure. Tous les regards se portent vers Menuchenet. On scrute la forêt. D’autres personnes et notamment Georges Nemery de Bellevaux (frère de Julien), Gustave Gillet, le bourgmestre faisant fonction Martiny et peut-être d’autres se seraient engagés par le chemin de «la Combrue» dans la pâture de Gustave Nemery et observaient à leur tour Menuchenet, près du hangar.
Entre temps chez Ferdinand Pierlot (en face de chez moi) les dames et demoiselles commencent à préparer des bouquets de fleurs.
Soudain, cela bouge du côté de Menuchenet. En effet, de chaquecôté de la grand-route, sur les accotements gauche et droit et en file indienne deux groupes de soldats s’avancent (une vingtaine en tout). Au centre de la route, s’avançant au rythme des militaires un curieux engin, inconnu pour nous: c’était une Jeep...
Longtemps on observe ces soldats. Sont-ils allemands? De loin, pas facile de voir la couleur des uniformes. L’un de nous s’écrie soudain: ce sont encore des Allemands! Et l’on précipite les bouquets de fleurs dans la cave... Puis l’escouade approchant, on se rend compte cette fois qu’il s’agit bien de soldats américains.
Tout le monde s’avance avec prudence vers la grand-route avec, bien sûr, les bouquets que l’on a rafistolés. Et nous observons avec curiosité comment ces soldats s’approchent de la première maison du village, en l’occurrence, l’habitation de Julien Guillaume. La maison est vide, la famille étant partie en un lieu moins exposé.
L’un des soldats s’avança tronc baissé et le doigt sur la gâchette vers la porte d’entrée, l’autre contourna la demeure et s’approcha de la porte de l’étable.
Les premiers contacts sont chaleureux: on leur serre les mains, les femmes et jeunes filles offrent les fleurs. Mais nos libérateurs nous font comprendre que l’endroit est dangereux. Nous sommes à découvert et c’est à cet instant qu’un obus sifflera dans la direction des «Prés Gyais». Tout le monde s’enfuira et se mettra à l’abri. Les soldats continueront leur route. D’autres s’installeront au lieu «la queue de Levé» près du petit pont. Ils y passeront la nuit.
On peut dire que notre village passera sa première nuit de libération dans le «no man’s land».
Emile Perot

Source Ici

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